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20 juillet 2009 1 20 /07 /juillet /2009 07:22

Mon chat n’est pas satisfait ce matin : les chats du premier rang l’ont snobé et sa copine a voulu bronzer intégralement.

Une petite chatte blanche, surtout, le regardait depuis la terrasse de sa maison « pieds dans l’eau » - une maison de premier rang. Pensez donc ! Elle portait sur elle cette morgue qu’ont les gens d’ailleurs qui se croient tout permis.

-         Les gens de l’été, dit mon chat, surtout quand ils sont de premier rang prétendent que « partout où un « premier rang » met le pied, là est un morceau de propriété privée ».

Il ne croyait pas si bien dire :

-         Ôte-toi de mon soleil dit-elle (déjà qu’il n’y en avait pas trop)

-         J’ai bien le droit d’être à la plage, dit Mouss’ qui, devant l’assurance de la chatte blanche n’était plus tout à fait sûr de son bon droit.

-         Tu t’assieds sur Mon perré, tu te couche sur Mon sable, tu encombres Ma vue.

-         Ce sable n’est pas plus à toi qu’à moi.

-         Papa paye des impôts pour qu’on ait le droit d’être seuls l’été. Il paye le droit de chaise longue.

Les gens de premier rang s’inventaient des impôts imaginaires se garder une place devant chez eux.

C’est alors qu’un domestique est arrivé 

-         Si Monsieur veut bien s’en aller

-         Monsieur ne partira pas

-         Je vais lâcher les chiens

-         Les chiens n’ont pas le droit d’aller sur la plage

-         Vous y êtes bien, vous les chats, et il y a plus de chiens que de chats sur la plage

-         Ils bravent l’interdiction. Vous n’avez pas vu les panneaux.

-         Il n’y a pas de panneau devant chez Monsieur !

Il fallait se rendre à l’évidence. Il y a encore des gens qui sont servis. Il y avait du mépris jusque dans la voix du domestique. Cela aurait pu durer longtemps si la petite chatte blanche n’était sortie avec ses parents en portant un lourd panier recouvert d’une toile.

-         C’est eux, dit le père en toisant Mouss’ ? C’est « des moins que rien », ils sont de second rang

C’est ainsi que ces gens nous jugeaient. Il est vrai qu’ils portaient des slips de bonne coupe. 

Passant le regard hautain, indifférent, transparent, un regard de premier rang comme on le voit faire dans les beaux quartiers quand les gens dits « de qualité » croisent des gens de banlieue, la famille partit embarquer sur un bateau qu’un marin venait d’amener près de la plage.

-         Tu ne crois pas, dit la petite chatte blanche en se retournant, que je vais me baigner dans la même eau que cette pouffiasse.

J’ai voulu bondir sous l’outrage mais le bateau quittait la côte. Pour où ? Un banc de sable où les gens à bateaux seuls entre eux. Il est vrai que le terme de seuls est très relatif. Là, au moins  ils pourraient se baigner loin de ces péquenauds avec rien que des gens à bateau. 

-         Ce ne serait pas la peine d’acheter aussi cher une maison de bord de l’eau si nous devions fréquenter tous ces gens qui viennent poser leur serviettes et leur cul à bronzer jusque chez nous dit la mère..

-         Le naturel revient au galop dis-je à ma copine plongée dans sa revue « people » où ne figuraient que des gens de premier rang.

Le vent portait, on les entendait discuter sur le bateau.

-         C’est trop nous narguer dit le père

-         Je parie qu’ils ne vont même pas à la messe, dit la mère qui n’avait que ça  - et le premier rang – pour référence estivale..

-         Que diraient nos invités s’ils voyaient tous ces gens-là pique-niquer sur le sable dit le père qui songeait déjà au bon vin qu’il allait boire. Une idée en entraînant une autre, il enchaînait : « Un jour que nous revenions de boire une bonne bouteille sur un banc de sable sous un cagnard terrible, notre voisin a tout renvoyé par dessus bord. »

-         Ce vin, finit-il par dire en hocquetant, il était aussi bon au retour qu’à l’aller.

 

C’est ainsi qu’on s’amuse l’été. Quand on est de premier rang. Encore faut-il avoir un bateau, savoir qui on fréquente et ne pas commettre d’impairs, ce qui est toujours possible, quand les gens n’ont qu’un slip de bain sur eux.

Si je me mettais toplesse dit ma copine.

                                                                              Les photographies sont de Régine Rosenthal

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19 juillet 2009 7 19 /07 /juillet /2009 06:08

Mon chat a une compagne qui voulait aller à la plage. Il lui en avait tellement parlé qu’elle lui a demandé de l’accompagner. Il ne pouvait pas le lui refuser. Aussi, ce matin, je l’ai entendu préparer son expédition (car c’en est une) avec un soin particulier. Il grommelait dans la pièce à côté :

-         la crème à bronzer, la crème solaire, les lunettes de soleil, les chaussures anti-vives, un parasol, un pliant – ah, non, ce n’est plus à la mode-  la serviette pour s’étendre, la serviette pour se sécher.

Une petite voix aigüe ajoutait :

-         Et le maillot de bains, où l’as-tu mis le maillot de bain ?

-         Au fond du sac. Je continue : tes revues de plage, ma revue porno

-         Tu me la prêteras, dis ?

-         Des fois que ça te donne des idées…

-         Faut-il amener un pot de chambre ?

-         Pourquoi faire ?

-         Il n’y a pas de Vc sur la plage.

-         Tu n’as qu’a faire dans l’eau, comme tout le monde. C’est plus propre et ça ne se voit pas.

C’est alors que mon chat a fait irruption dans la pièce où je me trouvais. Je me permis d’intervenir.

-         Tu as bien tout ce que tu voulais ? Heureusement que tu na vas pas faire un pique-nique avec les chaises, le frigo, les provisions, les couverts, la table, le tire-bouchon…la table.

-         C’est vrai qu’on aime tellement la table qu’on ne sait pas s’en passer, même pour un pique-nique

-         Il est interdit de pique-niquer à la plage

-         Je sais, par principe de précautions, à cause du sable qu’on pourrait avaler.

-         Tu ne crois pas que c’est plutôt à cause des débris que tu laisserais.

Laissant là cette conversation, mon chat m’a demandé, le plus sérieusement du monde

-         Tu as vu la météo, ce matin ?

-         Oui, on parle d’un anticyclone

-         Un vieux marin m’a dit que le temps allait se gâter, qu’il allait pourrir par l’ouest.

-         Et ton oreille qu’est-ce qu’elle te dit ?

-         La même chose. C’est scandaleux. On se demande ce que fait le gouvernement, l’été.

-         L’été, il est en vacances

-         Moi je te virerais le Directeur de la météo vite fait.

-         Les offices de tourisme nous promettent toutes du beau temps.

-         Ce sont des prévisions à long terme. D’ailleurs, dans les stations balnéaires il ne pleut que la nuit.

-         C’est égal, une bonne assurance ferait bien l’affaire.

-         Et un bon avocat.

-         Tu as raison, s’il pleut, je porte plainte.

-         Ah, oui, et contre qui

-         L’office de tourisme, le maire, la météo, le gouvernement.

-         Ça te feras une belle jambe

-         Ça me feras de l’argent pour les prochaines vacances. Avec la crise qui dure…

-         Dépèches-toi. . La marée monte et il n’y aura bientôt presque plus de plage.

-         Si la mer s’y met, maintenant où allons-nous ?

-         Tu n’as qu’à porter plainte contre l’Ifremer, les Services maritimes et Neptune lui-même.
- Pourquoi pas?










Photographies Régine Rosenthal et Antine@

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18 juillet 2009 6 18 /07 /juillet /2009 06:16

-         D’où viens-tu

-         De la plage

-         Qu’es-tu allé faire à la plage ? Ce n’est pas l’habitude des chats, çà.

      -         Je suis allé voir vos chattes.

      -         Ça t’amuses

      -         Plus qu’autrefois. Les femmes, naguère, étaient assises sur des pliants ou directement sur la plage. Maintenant, elles sont couchées, allongées sur le sable.

      -         C’est vrai, nous sommes passés de la civilisation assise à la civilisation couchée. Ce n’était pas la peine que l’homme préhistorique fasse tant d’efforts pour se tenir debout.

       -         C’est que tes chattes en vacances prennent exemple sur nous. Elles restent couchées tant qu’il y a du soleil. Comme nous. C’est la civilisation chattesque, félinesi tu veux.

-         En quoi ça vous ressemble ?

-         Regarde comme elles minaudent, mendient du regard quelque caresse à venir.

-         C’est tout ?

-         Non : elles s’ étirent comme nous, passent leurs pattes sur leur museau commenous, les passent aussi sur les seins, sur le ventre, sur les cuisses, sur les fesses. Les matous s’en mêlent, ils leur passent la patte sur le dos.

-         Elles n’ont pas de griffes ?

-         Si, et pour qu’on les voie elles les teignent en rouge vif, en bleu, en violet.

-         Elles ne s’en servent pas ?

-         Seulement la nuit, en boîte.

-         Pas sur la plage ?

-         Comment veux-tu te servir des griffes quand tu est couché. A moins que ce soit sur tes genoux ou ceux de ma maîtresse. Elles font patte de velours sur le sable mais…qu’ont-elles à la patte qui leur rend le coussinet si luisant ?

-         De la pâte à bronzer.

-         A bronzer mais pourquoi y en a-t-il qui sont si rouges ?

-         Parce qu’elles se découvrent trop et n’ont pas mis de la crème solaire.

-         Et le principe de précaution, qu’en fait-on ?

-         Il y a longtemps que je n’ai pas revu de décret de l’Ifremer leur enjoignant de recouvrir les parties de leur corps les plus vulnérables.

-         Nous, les chats, nous ne découvrons jamais.

-         Par principe de précaution ?

-         Par connaissances innées. Nous connaissons de naissance, tous les dangers de la nature, des orages, des tornades, des éclairs, du tonnerre.

-         Mais on nous dit partout que la nature est fragile.

-         C’est pour ne pas vous inquiéter qu’on dit ça, pour que vous veniez passer des vacances au bord de la mer.

-         Parce que tu crois que le bord de la mer, c’est dangereux ?

-         Il y a des vives, des méduses, des boulettes de mazout, des puces de mer…On peut même s’y noyer. Est-ce que tu m’as vu aller me plonger dans les vagues ?

-         Remarque qu’eux non plus n’y vont pas tellement.

-         Mais ils enlèvent leur pelure.

-         Leur pelure ?

-         Tu ne vas pas appeler fourrure ce qu’ils mettent sur le dos, ou ailleurs, quand ils en mettent.

-         Excuses moi mais je croyais que tu parlais de la peau qu’on enlève par lambeaux quand on a un coup de soleil.

-         Pouah ! Des peaux rouges pelés, tu imagines ce que tu dis ? Pourquoi pas écorchés, ou scalpés tant que tu y es ?

-         Au fond, tu vas à la plage pour leurs beaux yeux ?

-         Tu les as vus, leurs yeux, ils sont tout noirs. Pourquoi mettent-ils tant de crème à bronzer sur leurs yeux qu’on dirait un masque ?

-         Ce n’est pas de la crème à bronzer, ce sont des lunettes noires

-         Vous êtes curieux, vous autres. C’est égal, c’est un beau spectacle que la plage, l’été !
Photographies de Cécile Durand et Régine Rosenthal

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17 juillet 2009 5 17 /07 /juillet /2009 10:20
Mon chat est un petit animal qui a une tête, un corps, quatre pattes et une queue qu'il porte fièrement derrière lui.C'est sa tête, surtout, qui est intéressante. elle exprime, selon l'humeur, la curiosité, l'impatience, le doute, la compasion, l'indifférence, le besoin de tendresse... C'est un chat qui vit dehors la plupart du temps et qui surprend bien des secrets qu'il vient me confier contre caresses. C'est donnant donnant.Il est à mi-chemin entre le chat de Geluck et le chat Mürr des contes d'Hoffmann. Il a des idées sur tout : le bac, les touristes, le défilé du 14 juillet, le contrôle fiscal de Cendrillon, les aventures de Gargantua. Il écrit de belles lettres à sa chatte persane. C'est pour cela que je l'ai encouragé à écrire son blog, c'est à dire le mien. Ne faites jamais çà si vous voulez conserver la maîtrise du net. J'ai dû lui abandonner www.charlesdaney.ober-blog.fr. C'est à moi, c'est à dire à lui.
Il s'appelle Mon chat mais dispose de deux pseudos : Mouss' ou Mouska                                                                                                                                        .Photograhie d'Annie Delobez
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17 juillet 2009 5 17 /07 /juillet /2009 06:12

-         Alors ton neveu, comment va-t-il ?

-         Il a eu son bac

-         C’est bien, ça, mais pourquoi dis-tu son bac alors que c’est le bac de tout le monde

-         Je ne sais pas, on dit comme ça et puis, pourquoi dis-tu que c’est le bac de tout le monde ?

-         Parce que 86% des candidats l’ont obtenu.

-         Les journaux disent que c’est un bon cru.

-         Ce résultat était annoncé par le Ministère avant même les épreuves

-         Ils se sont trompés, ils ont dit 85%

-         Pour ne pas mettre les statistiques en difficulté. Mais pourquoi parles-tu d’épreuves ?

-         Je te vois venir, tu vas encore me dire qu’il faut supprimer le bac

-         Sûrement pas : c’est un tel monument qu’on mettrait la France à feu et à sang si on parlait de le supprimer.

-         Tant mieux. Comme ça, on n’y touchera jamais.

-         Il y a une autre façon de se débarrasser d’un cadavre, c’est de le noyer.

-         Le noyer, comment donc ?

-         En le donnant à tout le monde.

-         Tu crois qu’ils veulent noyer le poisson au Ministère ?

-         Ça en a tout l’air.

-         Juste au moment où ça marche si bien. C’est-y pas malheureux.

-         Parce que tu crois que les manifestants ont eu le temps de travailler cette année ?

-         La manif m’a tout l’air d’être la meilleure préparation au bac.

-         En effet, ça en a tout l’air.

-         Tu vois bien que ça marche.

-         Pour marcher, on a bien marché cette année. Les élèves n’ont même pas eu besoin de profs

-         C’est vrai, ça. Il ne reste plus qu’à supprimer les profs.

-         Tu parles comme Darcos. Je croyais que les profs étaient les principaux soutiens des élèves en grève.

-         Dis plutôt que ce sont les élèves qui soutenaient les profs. S’ils ne font rien, les gamins vont finir par se lasser.

-         De manifester ? Ça m’étonnerait.

-         Non, de les soutenir parce qu’ils ne sont pas francs du collier : un jour ils disent qu’ils ne corrigeront pas le bac, un autre, qu’ils ne donneront pas les notes, et ils continuent à nous promettent un chien de leur chienne. C’est pas une vie çà. Et puis ils coûtent cher et ils ont des vacances

-         Parce qu’ils n’ont pas de vacances, les manifestants ?

-         Mais eux, ils ne sont pas payés.

-         S’il n’y a plus de prof, on n’a plus besoin d’école. On va pouvoir économiser.

-         Il faudra entretenir la chaussée.

-         Tu crois que les gens aiment ça  les manifs ?

-         Qu’est-ce qu’ils auraient autrement à la télé, le soir, après dîner, entre un ou deux enlèvements d’otage, quatre ou cinq disparitions d’enfants, la découverte d’un tueur en série, la dérive d’un iceberg (comme en 1850) et quatre ou cinq lancements d’escort-girls. si, si, à « Problèmes de Société », il y avait même les promesses de sites et des renseignements sur les hôtels brésiliens..

-         Et que vas faire ton neveu après le bac ?

-         Manifester à la fac, bien sûr. Quelle question ! Qu’est-ce qu’on lui a appris d’autre ? .

 

Photographies d'Antine@ et de Régine Rosenthal
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16 juillet 2009 4 16 /07 /juillet /2009 10:44

-         Il parle, ton chat ? m’a demandé une internaute

-         Bien sûr que non mais nous partageons depuis si longtemps et avec une telle intensité une même vie que nous nous comprenons à demi-miaou.

C’est ainsi que pas plus tard que ce matin il est arrivé tellement défait que je n’ai pu que l’interroger.

-         Que t’est-il arrivé ? tu es bien pâle ce matin.

-     -         J’ai failli me faire écraser.

      -         Par une voiture ?

      -         Non. J’ai l’habitude des voitures quoiqu’elles soient de plus en plus grosses, de plus en plus rapides et de plus en plus inconscientes depuis quelques jours. Non, c’était sur la piste cyclable.

      -         Tu as failli te faire renverser par un vélo ?

      -         Non bien qu’il y en ait de plus en plus et de plus en plus rapides ?

      -         Par un roller, par un chien ? : il y a de tout sur une piste cyclable. Allons, parle !

-         Par un piéton.

-         Par un piéton ?

-         Oui de ces gens qui courent sur les pistes cyclables. Tu ne cours pas, toi ?

-         ça m’est arrivé de courir derrière un bus ou derrière un voleur.

-         Comme moi devant un chien. Toi derrière et moi devant. Eux, ils courent devant rien, derrière rien, ils courent pour rien.

-         Je les connais. Tu aurais dû faire attention. Ils portent des vêtements spéciaux pour courir comme les automobilistes doivent en mettre quand ils crèvent

-         Mais il ne courait pas quand je me suis arrêté.

-         Il ne courait pas ?

-         Non il faisait sa gymnastique. C’est même pour ça que je me suis arrêté pour le regarder.

-         Que faisait-il

-         Des flexions sur les jambes et de curieux petits mouvements comme s’il avait des haltères à la main.

-         Comme si tu n’en faisais pas, des étirements, les pattes en avant, le poitrail à ras de terre, les pattes arrières à l’allonger comme un jour sans pain.

-         Oui mais moi je ne le fais que quand j’en ai besoin.

-         Mais lui aussi en avait peut-être besoin.

-         Je ne crois pas, autrement il ne se serait pas arrêté là où il y avait le plus de monde pour faire ses flexions, ses re-flexions, ses génuflexions…

-         Ses réflexions ? On n’a pas besoin de réfléchir pour ça

-         J’ai dit flexion et re-flexion

-         Ses pompes, quoi ?

-         Pourquoi tu appelles ça des pompes ?

-         Ils pompent l’air

-         Tu me pompes l’air. Tu sais : ceux qui font de la gymnastique adorent se faire admirer.

-         Mais tout cela ne m’explique pas comment il a failli te renverser.

-         Parce qu’il ‘est relevé très vite et qu’il est parti comme une bombe alors que je ne m’y attendais pas.

-         Alors il t’a bousculé.

-         Oui il s’est mis dans mes pattes et il est tombé.

-         Tu t’es excusé au moins ?

-         Après la frousse qu’il m’a faite. Je parie qu’il a fait exprès de tomber sur moi rien que pour se faire plaindre.

-         Et toi, qu’as-tu fait ?

-         Je suis parti ventre à terre pour venir me réfugier dans tes bras.

-         Tu vois qu’il t’arrive de courir devant rien.

-         C’est égal, venir de Paris pour ça, alors qu’ils ont la plage et la forêt où il n’y a personne à l’heure où ils courent, faut le faire.

Et mon chat partit en chantant « L’air et pur, la route est large ». Il était consolé.




Photographies de Cristelle Daniel et Régine Rosenthal
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15 juillet 2009 3 15 /07 /juillet /2009 10:09

 I - Il est venu, l’homme de guerre ; il a revêtu son armure, il a chaussé ses leggings, il a décroché sa lance, son arc et ses flèches, il a déterré sa kalachnikov, il a enfourché son char d’assaut, il s’est glissé dans son « mirage ». L’homme de guerre est de tous les pays et de tous les temps. Il a brandi ses poignards d’airain. Il a pris le sentier de la guerre et les foules fuient devant lui. Elles n’ont pourtant rien à faire de cette guerre. Il y a là des femmes et des enfants. Surtout des femmes avec leurs enfants. Ils sont à pied, souvent pieds nus. Les machines de paix ne les portent plus, leurs chariots sont éventrés, les chevaux sont étripés, les automobiles aux pneus crevés n’ont plus d’essence. On a basculé dans les fossés ces voitures inutiles. Les foules continuent sans elles. Elles ne se cachent pas. Elles vont en longues bandes comme vont les fourmis et les chenilles processionnaires. Elles courbent le dos sous les coups et s’affolent à chaque passage en rafale d’avions qui mitraillent. C’est tout ce qu’elles peuvent faire, courber le dos ou se mettre à plat ventre dans les fossés. Elles fuient. Elles n’ont pas le temps de se nourrir. Avec quoi se nourriraient-elles ? Les campagnes sont dévastées et les cités sont en feu. Comment s’arrêteraient-elles ? La mitraille siffle autour d’eux. Il court vite l’homme de guerre, campé sur ses chevaux d’acier.

Les enfants n’accompagnent plus les soldats en battant d’un jouet-tambour. Les filles ne regardent plus les militaires drapés dans de rutilants uniformes. Les femmes n’applaudissent plus les troupes qui défilent. Les hommes qui ne fuient pas ont peur qu’on les dérange dans leurs trafics, dans leurs affaires, dans leurs magouilles. L’homme de guerre est en tenue de combat. Il s’est fardé le visage, il a maculé son treillis, il peut surgir d’un instant à l’autre. Les foules fuient en longues files apeurées, tremblantes, hagardes, hâves, dépenaillées. Elles n’ont qu’une hâte les foules en fuite, c’est d’échapper à la soldatesque, d’aller plus vite qu’elle. Les enfants qui jouent encore à la guerre ont jeté leurs fusils de bois. Ils jouent à enterrer des poupées, ou le petit chat qu’une balle perdue a laissé pour mort sur le bord de la route. La guerre a pris un goût de cendre.

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15 juillet 2009 3 15 /07 /juillet /2009 07:21

Mon chat était content, hier soir. Il avait vu le défilé et m’avait arraché la promesse de sortir avec nous..
-       Tu es si content de sortir ce soir ?.

      -         Je veux voir le feu de sacrifice

      -         On ne dit pas le feu de sacrifice mais le feu d’artifice.

Mon chat, qui n’écoutait plus, se précipitait aux premiers éclatements des fusées. Nous avons failli le perdre tant il se faufilait en vitesse entre les pattes des humains qui nous faisaient obstacle et se précipitaient eux-mêmes vers la jetée d’où partait le spectacle. Nous l’avons retrouvé en première ligne bien installé sur la plus haute marche d’un escalier conduisant à la plage. Tous s’exclamaient et mon chat aussi fort que les autres

      -         La belle blanche, la belle bleue, la belle rouge, la belle verte.. .

Les gerbes succédaient aux fusées à deux ou trois étages ou plus, la roue aux gerbes unies ou tricolores et la foule en délire criait comme le font les supporters au cours des matches « Vas-y petit, t’as gagné – ah putain qu’elle est belle celle-là… » Qui n’a pas vu une foule en délire ne peut connaître l’état d’excitation de mon chat ce soir-là.

La dernière fusée s’éteignit dans un crépitement d’étincelles. La nuit était noire. Les étoiles , au ciel, se rallumèrent une à une, puis les lanternes de la ville.

 Ils applaudissaient tous, à l’exception de mon chat

-         Tu n’applaudis pas ?

-         Je voudrais bien mais comment veux-tu que je claque des pattes avec mes sacrés coussinets? Même les griffes sorties, ça ne fait aucun bruit.

«  Ceux qui tricolorent

Ceux qui décolorent… »

Des vers de Prévert chantaient dans ma mémoire.

Je pris mon chat à partie.

-         Tu es vraiment content de ta journée ?

-         C’était un beau feu de sacrifice

-         Je te répète qu’on dit un feu d’artifice.

-         On n’artifie rien , on sacrifie la Bastille.

-         Personne n’a jamais sacrifié la Bastille, même de Launay qui a hésité à faire sauter la poudrière. On fête la prise de la Bastille.

-         Qu’est-ce qu’on prend ce soir ?

      -         Que veux-tu prendre ?

      -         L’Elysée

-         Je me sentis blêmir et après un rapide coup d’œil alentour pour voir s’il n’y avait pas quelqu’un des Renseignements Généraux :

      -         Viens vite, lui dis-je, on va prendre un verre.

      -         Un verre ? ça ne mérite pas un feu d’artifice.

      -         Mais le feu d’artifice mérite un verre.

-         Se laissant entraîner en rechignant, mon chat finit par s’installer à la terrasse d’un café pour me dire

      -         Où est-ce qu’il chante, Johny ?

      -         Pourquoi veux-tu que Johny vienne chanter un 14 juillet?

      -         Tu écoutes la radio quelquefois ?

      -         Quelle raison aurait-il de chanter?

     -          La tête de Launay, la libération de Sade.

      -         Et les Suisses..

      -         On ne parle pas de Suisse devant Johny

      -         Oui mais Johny chante à Paris.

     -         Paris, toujours Paris. Est-ce qu’il reste encore de Parisiens à Paris ?

      -         Bois, au lieu de rouspéter.

Quand mon chat eut sifflé son demi de lait à la grenadine le l’entendis clamer à la cantonade :

-         Alors, c’est quand qu’on va guincher ?

Est-ce l’effet de la fête ? Nous avons senti comme une bouffée de débauche franchouillarde.
Photos d'Anrine@ et de Régine Rosenthal

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14 juillet 2009 2 14 /07 /juillet /2009 06:39

      -         Tu es bien guilleret ce matin 

      -         Oui, j’ai pu avoir une place au premier rang et tout en haut pour voir le défilé.

      -         Tu aimes les défilés militaires ?

      -         J’ai le cœur qui bat quand bat le tambour.

      -         Quel tambour ?

      -         Celui de la garde républicaine

      -         Tu aimes la garde républicaine ?

-         Leurs chevaux qui font du culturisme avec leurs muscles, leurs crinières qui flottent au vent.

      -       La crinière des chevaux ?

       -         Non celle des gardes. Il paraît même qu’il y aura parmi eux quelques femmes cheveux au vent.

      -         Je crois que tu exagères parce qu’il n’y aura pas de gardes républicains, rien que des pompiers

      -         Ça ne fait rien ils ont de beaux casques qui brillent au soleil. J’espère qu’il y aura au moins des légionnaires.

      -         Pourquoi des légionnaires ?

      -         Parce qu’ils aiment le boudin et qu’ils sentent bon le sable chaud.

      -         Il n’y en aura pas.

-         Pas de sable chaud ? Et celui de la plage qui sent l’huile à bronzer ?

-         Je n’ai pas dit qu’il n’y avait pas de sable chaud, j’ai dit qu’il n’y aurait pas de légionnaire.

-         Qu’est-ce qu’il y aura alors ?

      -           Une moto-pompe et peut-être un vieux half-track de la dernière guerre.

      -         Pouah ! Rien que des machines puantes et bruyantes qui me font cacher sous les meubles.

      -         Il n’y aura pas de meuble autour du monument aux morts.

      -         Pas de meubles, pas de sapeur, pas de mouton, qu’est-ce qu’il y aura alors ?

      -         Le sous-préfet.

      -         J’espère qu’il va décorer quelqu’un de la légion d’honneur. J’aime ça : « ouvrez le ban !» « fermez le ban ! ».

      -         Il n’y a personne à décorer ici, aucun chanteur, aucun sportif

      -         Et Obispo et Laporte ?

-         Ils sont déjà décorés et puis ils sont décorés à Paris.

      -         Mais le 14 juillet, tout Paris est ici.

      -         C’est pour ça qu’ils annoncent les promotions le 14 juillet et qu’ils décorent plus tard, quand les Parisiens sont rentrés chez eux.

       -         Avec tout ce que je fais, je ne pourrais pas être décoré ?

      -         Tu es connu ? Tu es passé dans les médias ? Tu as chevroté un miaulement patriotique ?

-         Parce qu’il faut que ce soit patriotique ?

-         Pas nécessairement mais il faut que ce soit pipolé

-         Pipe au lait ?

-         Demande à Lady Marianne elle a fait un blog sur le mot  pipolisation et son entrée au Petit Larousse 2010.

-         Le vieil Hugo l’a dit : « Je mets le drapeau rouge au Vieux dictionnaire ».

-         Tu appelles ça un drapeau rouge, la pipolisation ?

-         Pas la pipolisatin mais la légion d’honneur couleur du sang versé et des champs de bataille.

-         Je te dis qu’on décore surtout les baladins qui sont nos chants-donneurs.

-         Tu verras, quand j’aurai l’Oscar du meilleur acteur.

-         Et si tu ne l’as pas ?

-         Pourquoi es-tu si négatif aujourd’hui ?Tu la voudrais, ma place ? Dis, tu la voudrais ?

-         Viens plutôt avec moi voir le défilé à la télé : il y aura des légionnaires, des gardes républicains et des soldats indiens.

-         En gandoura, comme Gandhi ?

-         Gandhi, la non-violence en Inde, c’est du passé.

-         Mais si je regarde le défilé à la télé, il n’y a que toi qui me verra.

-         Parce que tu crois qu’on te verra dans la foule ?

-         Avec tous ces paparazzis qui vont couvrir l’événement, on ne sait jamais. Il suffit de se mettre en avant.

Les chats sont de Régine Rosenthal, la céralique de Nicole Chatignol
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13 juillet 2009 1 13 /07 /juillet /2009 06:36

-         D’où viens-tu, je ne t’ai pas vu de l’après-midi.

-    -         Je passais mon casting.

      -         Quel casting ?

      -         Pour le nouveau film sur les campings avec Franck Dubosc. On ne parle que de ça depuis quelques jours.

      -         Mais tu t’es vu ? Tu es tout ce qu’il y a de plus ordinaire, un chat pré-rayé comme un vulgaire saumon d’élevage.

      -         L’habit ne fait pas le moine.

-         Que veux-tu dire par là

      -         Qu’il y a l’intelligence, l’allure, la distinction, les manières, les codes

-         Les codes ?

-         Oui, savoir comment on doit tendre une patte, s’étirer, pousser sa tête, caresser ses oreilles, friser ses moustaches… Il y a une manière distinguée de se rouler sur un tapis.

-         Et tu crois savoir ?

-         Oui puisque j’ai été retenu pour le film.

-         Mais pourquoi diable veux-tu faire un film près de chez toi ?

-         Pour être reconnu dans la rue, pour qu’on me demande des orthographes

-         L’orthographe tu n’en as pas besoin mais il faudra signer des autographes

-         Alors, il faut que tu m’achètes un Mont Blanc

-         Du chocolat, pour quoi faire ?

-         Pas du chocolat, un stylo, pour signé les ortho…les autographes..

-         Ça s’est bien passé ?

-         La directrice du casting m’a demandé si je serais libre pour aller présenter le film à Cannes

-         Tu as donc le rôle principal ?

-         Pas tout à fait principal, mais essentiel.

-         Que fais-tu ?

-         Je me gratte derrière l’oreille pour annoncer la pluie. Je suis le chat-météo.

-         Tu le  fais souvent ?

-         Une fois, mais tout le film tourne autour de cette séquence.

-         Pourquoi penses-tu que c’est la séquence essentielle ?

      -         Parce qu’il ne se passe rien dans un camping quand il fait beau. C’est la pluie qui crée l’événement.

      -         Et ça marche, de se gratter l’oreille ?

      -         Bien sûr parce qu’ils ont des effets spéciaux : ils me versent de l’eau sur la tête avec un arrosoir -         Je comprends qu’ils aient besoin de te payer cher : verser de l’eau sur la tête d’un chat, j’aimerais voir ça.

      -         Qui t’as parlé de payer cher ? Je fais ça pour la gloire.

      -         Dis plutôt la gloriole.

      -         Gloire ou gloriole, c’est pareil.

      -         Et tu acceptes ?

      -         Un plan américain, ça ne se refuse pas. Je suis très reconnaissable, tu sais.

-         Cabot, va

      -         Je ne suis pas cabot, je suis réaliste.

      -         Ah oui ?

      -         Tu verras quand j’aurai reçu l’oscar du meilleur acteur comme tu seras fier de moi.

      -         Moi, fier ?

      -         C’est toujours comme ça, c’est moi qui bosses et c’est toi qui en tire tout le profit.

-         C’est normal, tu n’es pas majeur. C’est comme les bébés de six mois qu’on a recruté. On a même demandé des bébés naturistes. Tu n’es pas naturiste au moins ?

-         Non. Les naturistes, c’est pour le décor

-         Tu n’es pas le décor ?

-         Tu n’as pas compris encore, que mon rôle est capital pour l’action.

-         Comment le sais-tu ?

-         J’ai lu le scénario. Je ne suis pas de ceux qui s’embarquent à la légère, MOI. Laisse-moi dormir.

Photographies Hélène Durand, Marie-Françoise Ducasse.
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