- Maintenant que tu sais comment je suis revenu de l’île aux Oiseaux tu peux bien me dire comment état le champ de
bataille
- Le Solférino que je suis allé voir n’est pas un champ de bataille
d’Italie. Mon Solférino est un village landais qui fut un temps le domaine personnel de Napoléon III
- Et qui as-tu vu là-bas ?
-
Un garde républicain
- Je sais, il t’as même promis du fumier pour ton
jardin
- Pas du tout il le donne son fumier, et par tonnes à la fois.
- Disons que j’ai mal compris. Qui y avait-il
encore ?
- Un sous-marinier
- Qu’est-ce qu’il pouvait bien faire avec son sous-marin dans les
Landes ?
- Il est en poste à Brest, pas à Solférino.
-
Peut-être cherchait-il à créer une base secrète au marais du Plattier ?
- Un étang à sangsue, ce n’est pas le rêve pour un
sous-marinier.
- Qui encore ?
-
Un marchand de missiles
-
Ça c’est normal : au centre d’essai des landes il vaut mieux apporter ses munitions mais lorsqu’on n’en a pas, on est content d’en trouver à proximité. Mais
que faisaient-ils là-bas tous ces gens ?
-
Une réunion secrète pour une mission secrète.
-
Pour un lieu secret, c’est un lieu secret
-
Solférino sue le secret comme le pin sue la résine
-
Et quelle est cette mission ?
-
Piquer ses idées socialistes à l’Empereur
-
Parce que les socialistes avaient des idées à l’époque ?
-
L’Empereur aussi, c’est plein d’utopies : babouvisme, fourriérisme, saint-simonisme. Tout ce qui se termine par isme
-
Capitalisme…
- Ça, c’est une utopie qui n’est
pas perdue pour tout le monde.
Il a pris des socialistes à son service, l’Empereur ?
-
Michel Chevalier, les frère Pereire. Tout chef d’État a ses socialistes de service.
-
Mais toi, qu ‘as-tu fait là-bas ?
- J’ai mangé dans l’étable à bœufs de la Petitee ferme
impériale
- À la mangeoire ?
- Il n’y a plus de bœufs à la ferme impériale mais du foie gras en
blocs, de l’oie aux cèpes avec de vrais cèpes.
- C’est tout ce qui t’as frappé ?
- Non, bien sûr, il y avait Sainte Eugénie l’église de l’Impératrice
et puis les fermes modèles.
- Des fermes modèles dans les Landes, tu m’étonnes.
-
Des maisons à étage que l’on appelait des cottages situés au milieu d’une exploitation regroupée.
-
On y faisait quoi ?
-
De tout, du quinoa, du mélilot, du delkkelé, du thopn-sing, du chien uh…
-
Tu ne pourrais pas parler français ? ils étaient chinois ces gens-là ?
-
Non, ils venaient de la lande voisine :Labouheyre, Commensacq, Sabres, Lüe, Onesse.
-
Si tu dois me réciter toutes les communes des Landes…
-
Seulement celles qui ont vendu des terres à l’Empereur qui cherchait à arrondir ses terres.
-
Et ses métayers que faisaient-ils ?
- C’est là la nouveauté : tout nouvel arrivant avait des
semences, des engrais, un porcelet, une vache laitière, une maison à louer, des médailles à gagner…
- Et du fumier
-
Pour avoir du fumier il faut des bêtes qui aient déjà travaillé.
- Tu m’as parlé des
bœufs
- L’Empereur les prêtait à ceux qui en avaient
besoin.
- C’était un gentleman-farmer… Tu as tout vu à
Solférino ?
-
Pas le corset de l’Impératrice
- Elle y a perdu son
corset ?
- Oui et son abeille .
- C’était un bournac, son corset?
- Un corset, c’est pas une ruche.
- Elle y faisait son miel, l’abeille ?
- C’était une abeille d’argent qui fermait le
corset.
- Sur le nombril ?
- Je ne sais pas, je ne l’ai pas vue.
Les photographies sont de Régine Rosenthal
et d'Antine@