VII
Le murmure de l’Océan, une vague qui vous lèche les orteils, le rouleau qui s’aplatit devant vous, le coquillage qui roule sous la plante
des pieds, tout cela, c’est l’enfance. Elle en avait retrouvé la mémoire, qui est le retour intime du passé
La nuit tombait sur l’aquarium. Dans la lumière glauque des lampes de veille n’apparaissaient que les blouses blanches du personnel halophile qui distribuait des pilules blanches ou roses aux poissons et coquillages à demi endormis. C’était l’heure des confidences dites à voix étouffées, quand, dans l’aquarium, des souvenirs montent en bulles.
VIII
Les renvois d’élèves qui n’ont pas seize ans semblaient ignorées des instances rectorales qui faisaient volontiers la sourde oreille et n’auraient jamais mis les pieds dans cet enseignement sauvage qu’ils considéraient comme les latrines de l’éducation. Ils se gardaient bien d’en retirer les enfants perdus. De peur de se salir les mains, sans doute.
L’aquarium lui semblait tout à coup plus glauque, peuplé d’être difformes bardés d’appendices comme en ont les poissons des abysses. Il avait touché le fond dans le silence noir des grandes profondeurs où ne perçait qu’une lumière diffuse émise par des lucioles phosphorescentes.
IX
De parler de sa mère, qu’il n’avait pas connue, de sa grand mère qu’il avait vu vendre tout ce qu’elle possédait, petit à petit, avec une parcimonie dont je mesurais toute la peine contenue à l’évocation de ce qui le rattachait au passé qu’il aimait, l’avait ragaillardi.
L’orage se préparait. L’aquarium avait pris la teinte argenté du mercure. Les poissons s’y profilaient en longs traits d’encre comme sont les caricatures.