- Tu as vu,
me dit-il, ils sont tous arrivés.
- - Qui, tous ?
- Les chats avec leurs maîtres
- Ça va te faire de la compagnie cet été.
- De la compagnie ? Tu as vu comment ils se tiennent ?
-
Et comment donc ?
- Ils s’installent dans mon jardin, mangent mes croquettes, rentrent dans ma maison, montent sur ma table.
- Tu n’aime pas les « estrangeys » ?
- Si, mais pas quand ils se croient tout permis parce qu’ils viennent de la ville.
- Ils voudraient bien jouer avec toi.
- A condition de commander. Ils se croient chez eux partout et m’en chasseraient volontiers.
- C’est leur façon bien à eux de te montrer qu’ils aiment ton pays.
-
Ils ne pourraient pas faire autrement ?
- Ils nous demandent plein de renseignements sur l’histoire des lieux et des villas qu’ils ont louées ou achetées.
- Pour mieux se les approprier. Ils ne s’intéressent au pays que pour faire croire qu’ils sont chez eux. Est-ce que je vais les déranger dans leurs cours, leurs salons, leurs balcons, leurs immeubles ? Est-ce que je leur demande à quelle époque ils ont installé leurs gouttières, changé les tuiles de leurs toits ? Est-ce que je leur dis comment ils doivent arranger leurs maisons ? Qu’est-ce qu’ils ont de plus que nous pour nous mépriser comme cela ?
- Leur argent, qu’ils nous apportent
- Ça me fait de belles pattes.
- A toi, non, mais aux commerçants, oui
- Comme si c’était une raison pour faire du bruit à toute heure.
- Ils disent que tu es toujours en vacances et qu’ils ont bien le droit d’en prendre aussi.
- C’est bien ce que me disent les chats des touristes mais ils n’ont qu’à venir cet hiver, je leur montrerai ce que sont nos vacances hors saison. Je les recevrais volontiers.
- Parce qu’ils ne te reçoivent pas ?
- Ils ne se reçoivent qu’entre eux.
- Je croyais qu’ils avaient besoin de nos renseignements ?
-
Si tu les entendais « D’où vous venez, qu’est-ce que vous faites, vous connaissez un tel ? Moi aussi…» Ce ne sont plus des bains de mer, c’est un
bain social qu’ils cherchent dès qu’ils arrivent pour savoir qui ils peuvent fréquenter alors qu’ils ne se fréquentent pas d’ordinaire, même s’ils sont voisins dans la même
ville.
- Si tu crois qu’ils ont le temps de se fréquenter quand ils travaillent ?
- C’est pour ça qu’ils ne veulent pas nous fréquenter quand ils sont
en vacances ? Enfin, ça nous permettra de dire ouf ! un jour, quand ils partiront.
- Mais eux, ce jour-là, ils te serreront la patte pour te dire :
« à l’année prochaine ». et tu seras content. Ça rythme le temps qui passe.
- Parce que tu as besoin d’un rythme ? Moi, ils me fatiguent et
j’attends impatiemment qu’ils s’en aillent pour aller dormir dans leur jardin ou sur leur terrasse.
Les photograhies sont de J.C.Lauchas, Régine Rosenthal et Antine@