Nadia
Il y avait une fois une petite fille qui s’appelait Nadia. Elle habitait un appartement où il n’y avait qu’une pièce. Elle s’y ennuyait beaucoup, ne parlait jamais et ses parents la
disaient idiote. Elle ne sortait pas dans la rue, pleine de voitures qui vont trop vite et de ménagères qui bousculent tout le monde avec leurs paniers à marché. Elle n’allait que dans la cour,
mais une cour si étroite qu’elle ne s’y désennuyait jamais.
Un jour qu’elle était assise dans la cour, elle sentit un petit choc sur la joue.
- Qui est là ? murmura-t-elle, parce qu’elle savait quand même murmurer.
- C’est moi, dit une petite graine qui lui a raconté l’automne et comment elle s’était échappée du bec d’un oiseau et lui dit que si elle la mettait dans un peu de terre du vieux pot de fleur, elle pousserait peut-être.
Une autre fois c’est quelque chose qui lui a fait froid dans le cou : un flocon de neige qui lui dit que c’était l’hiver et qu’il avait peur d’être pressé en boule ou écrasé par un ski. Parce que Nadia lui a plu, il s’est retenu de fondre tout un jour pour qu’elle joue avec lui comme s’il était en peluche.
Un jour encore elle a senti sur sa jambe la pointe d’une brindille tombée du bec d’un moineau. Elle a écouté l’oiseau toute la journée parler du printemps, des bourgeons et des nids que les moineaux font. La petite brindille fut tour à tour baguette de fée, pinceau, aiguille à tricoter, épingle dorée pour finir la journée sur le vieux pot de fleur où perçait une tige vert.
La tige avait bien grandie quand Nadia reçut sur la tête un oiseau maladroit qui apprenait à voler. Elle l’a retenu dans ses deux mains et l’a caressé longtemps. C’était l’été.
Nadia était heureuse de toutes ces choses qui étaient venues à elle. Il lui vint l”idée de les questionner parce qu’elle les aimait et, pour les questionner, elle se mit à parler.
Ses parents l’ont dite guérie. Elle l’était, en effet.
O*Photographie de Régine Rosenthal