- Tu te souviens que nous
parlions des pieux l’autre jour et de Tartuffe en particulier
- Et alors ?
- Alors, dans une définition de mots croisés quand j’ai vu faux dévot je n’ai pas pensé à Tartuffe
- Pourquoi ?
- Parce que Tartuffe est un vrai dévot qui profite de la dévotion pour capter les héritages. S’il avait été un faux dévot il n’aurait pas fait autant de scandale.
- Il est vrai qu’une de tes amies disait l’autre jour qu’on ne trouve plus ça dans l’église mais plutôt dans les sectes.
- L’un n’empêche pas l’autre :Tartuffe n’a pas glissé de l’église aux sectes, il s’est multiplié tous azimuts sans disparaître de ses premiers abris.
- Tous azimuts ?
- Partout où les idées «tendances » facilitent la crédulité des gogos, le soutirage d’argent et les détournements d’héritage..
- Les idées tendances ?
- Le profit au bout des sentiments
- TON profit au bout de MES sentiments
- L’appel aux bons sentiments, c’est payant.
- De quoi veux-tu parler ?
- De certaines ONG, de l’ARC, des gens qui te flattent tellement que tu ne peux plus t’en passer. Les politiques ne sont pas exempts de ces comportements.
- Les politiques ? Et moi qui croyais dur comme fer aux bons sentiments.
- Il te suffit de lire les journaux. Les bons sentiments, ça aide pour arnaquer les autres. Tu n’a jamais entendu quelqu’un te dire tout bas les mots que tu attends ?
- Sur la religion ?
- Sur la politique, la religion, la misère du monde. Tartuffe a toutes les religions, toutes les politiques, toutes les pitiés du monde lorsqu’il te parle. La réalité, c’est qu’il n’en a aucune au fond du cœur.
- Il n’y a pas de petits Tartuffe
- Si et même des Tartuffes collectifs : les banquyes qui font du charme en espérant récupérer ta maison - si, si, ça s’est vu en Amérique et ici aussi sans doute, - les marchands qui te font surendetter en espérant quelque profit nouveau etc.
- Ce sont des menteurs ?
- Des menteurs de tous bords qui en veulent à ce que tu as. S’ils captent une fois ta confiance, après, c’est trop tard. Souviens toi « C’est à vous de sortir, vous qui parlez en maître ». Surtout s’il t’a trouvé un maison de retraite. Il était si gentil…
- Comment distinguer les bons des méchants, ceux qui veulent t’aider de ceux qui veulent t’arnaquer ?
- Le malheur, c’est qu’on ne les distingue pas. Toi même, quand tu ronronnes à tout bout de champs, quand tu cherches des caresses, quand tu te coules sur mes genoux, c’est pourquoi ?
- Je n’en ai jamais voulu à ton bien
- Qu’est-ce qui le prouve ?
- Mon intérêt. Qui me caresserait si je prenais ta place ? Qui continuerai à me donner des croquettes ? A qui j’apporterais mes souris ? Tu vois, tout le monde n’est pas Tartuffe.
- Mais Tartuffe, ce n’est pas tout le monde. Comment s’en protéger ?
- En gardant la maîtrise de soi, de ses émotions, en te méfiant de ce qui est par trop « tendance »…Mais je te connais bien. Quand je ronronne, tu es prêt à fondre. Alors tes conseils…
- Tes ronrons seraient-ils tendance ?
- Mes ronrons ne sont pas tendance, ils sont coutumiers depuis des siècles et des siècles. Ce sont tes journaux qui font les tendances.
- Et les victimes ?
- Ce sont les victimes. Tu peux toujours les plaindre et les aider quand ils n’ont plus rien à prendre. Personne, alors, ne te prendra pour Tartuffe. Mais fais-le directement, si possible, c’est plus sûr.
- Les intermédiaires ?
- C’est un peu la roulette russe.
Photographies Jean Nogrady