Le blog de charles daney

- Tu a svu le journal :"perdu crocodile répondant au nom de..."

-A poils ou à plumes.

- Ni poils ni plumes : les crocodiles ont des écailles, des pattes tortes, des yeux bêtes, un gueule à grandes dents et une queue superpuissante. De plus ils vivent dans les marigots

- C'était au lac de Cazaux.

- C'est pareil. Il n'avait ni poils ni écailles : il était en plastique gonflé et je l'ai vu s'envoler.

- S'envoler?

- Il faisait un vent à...

- Faire voler un crocodile.

- Exactement. Il s'est envolé dans un tourbillon. Le vent le poussait à la vitesse d'un cormoran.

- Tu veux dire d'un trimaran?

- Si tu veux et tout le monde nageait derrière lui.

- D'habitude c'est le crocodile qui nage derrière les gens et qu'est-il arrivé?

- Les nageurs ont perdu le crocodile.

- Ils ont prévenu la SPA?

- Ni la Spa, ni les pompiers, ni la police, ni les secours en mer ; ils en ont acheté un autre.

- Et qu'est devenu le crocodile envolé?

- Il a dû se réfugier dans les roseaux avec les boîtes de bierre, les bois flottés et les objets non identifiés.

-Mais c'est dangereux un crocodile dans le marigot de Cazaux.

- Quand je te dis qu'ils font n'importe quoi les aoûtas

- Pas les aoûtas, les aoûtiens.

- Les aoûtiens si tu veux. Après les crapauds buffles, les écrevisses américaines, les ragondins, les frelons siatiques, voici les crocodiles made in China.

Photographies Régine Rosenthal et Jean Nogradu.

-         Dis-moi, j’ai réfléchi à ce que tu m’as dit hier de l’écolo des villes et de l’écolo des champs

-         Et qu’en as-tu déduit ?

-         Que les premiers ne veulent rien abandonner et que les seconds veulent tout prendre.

-         C’est un  peu çà

-         Que tout le monde veut bien faire des efforts mais attend que les autres commencent.

-         Çà t’étonnes. Tu sais bien que tout est toujours de la faute des autres.

-         Même des chats ?

-         Même des chats : ils cassent les vases, renversent le lait, dispersent leurs litières, déroulent les rouleaux de papier hygiénique, font des petits quand on ne s’y attend pas…

-         Aux qualités que l’on attend des domestiques combien de maîtres…

-         Je sais, j’ai déjà entendu çà dans ma scolarité mais  ce qui m’ennuie, c’est que les conseilleurs ne font pas toujours ce qu’ils recommandent.

-         C’est aux autres qu’ils demande des sacrifices, aux pauvres de préférence.

-         Normal ! Ils sont plus nombreux et ils ont l’habitude d’obéir.

-         Salauds de pauvres !

-         Une vieille chanson que tu retrouves là.

-         Je sais ce sont les riches qui ont le plus de besoins.

-         Ce sont là des théories fumeuses

-         Mais souvent redites et souvent appliquées

-         Quand demande-t-on des sacrifices ?

-         En temps de guerre, d’occupation, de crises…

-         À qui les demande-t-on ?

-         Aux autres : le monde a toujours été divisé entre possédants et non possédants, les possédants ne veulent rien perdre de ce qu’ils possèdent et pensent que les seconds devraient faire des sacrifices qui leur éviterait d’en faire

-         Pourquoi çà leur éviterait d’en faire ?

-         Parce qu’ils sont si peu nombreux que, même s’ils en faisaient, çà n’apparaîtrait pas.

-         Ils sont si peu nombreux ?

-         Ils le font croire et chacun veut se glisser dans le côté privilégié.

-         Tu as vu çà, quelquefois ?

-         En 40 et je ne suis pas loin de croire que les écolos jouent la carte du marché noir

-         Comment çà

-         En nous faisant peur, en nous obsédant d’écologie comme on nous parlait de famine et de restrictions.

-         Comment çà ?

-         En serinant tous les jours la peur.

-         Que la Société meure, pourvu que vivent les tyrans.

-         Quels tyrans ?

Ceux qui veulent nous imposer des idées et des comportements que nous n’aurions pas forcément sans eux.

-         Tu fais quoi, me dit Mouss’

-         Ma déclaration d’impôts

      -         C’est quoi çà ?

      -         Je dis ce que j’ai touché en 2009

      -         Çà sert à quoi çà ?

      -         À établir l’assiette des impôts que je dois retribuer

      -         C’est plein de croquettes, çà ?

-         Non.

      -         Çà sert à quoi, alors, ton assiette ?

       -         À donner de l’argent à l’État.

-      -         C’est comme qui dirait la sébillle que tend l’État à la charité publique

      -         Un peu çà sauf que c’est imposé.

-         Un racket ?

-         Pas tout à fait

-         Çà sert à quoi, alors, cet argent ?

-         À payer l’État

-         Pourquoi tu paies l’État quand il y en a tant qui se font payer par lui ?

-         Parce que je suis dans la liste des imposables

-         Il n’y a pas un autre nom qu’imposition.

-         Si, contributions

-         Pourquoi tu ne dis pas contributions alors

-         Parce qu’on me dirait contrit d’avoir à faire cette déclaration alors que je dois être  heureux d’accomplir mon devoir civique

-         Parce que ceux qui ne la font pas sont malheureux ?

Photo Régine Rosenthal