- Alors, mon chat, tu as mangé des souris corses?
- Non, les forêts sont pleines de piquants de châtaignes
- Les cochons n'ont pas peur, eux
- Et toi, qu'as-tu mangé?
- Du cochon à la châtaigne en jambons, lonzos, saucissons...
- Ils en restait encore, après le passage des touristes?
- C'est pas comme l'essence : pas de restriction
- Et toujours bon?
- Pas toujours. Un jour, nous sommes allés dans une auberge : une table épaisse comme un banc de boucher et des bancs pareils, sous les bougainvilliers.
- Les bougainvilliers étaient un peu passés.
- çà, c'est la saison. Mais on voyait la mer
- un petit coin entre deux montagnes.
- Je sais mais çà suffit pour voir les touristes.
- Tu as bien mangé?
- Mal : c'est un coin pour touristes et la saison en était passée L'aubergiste, seul, avait de la gueule: barbe blanche carrée et verbe haut
- Que disait-il?
-N'importe quoi et quand je lui ai demandé si on ne l'avait pas mis sur écoutes, tu sais ce qu'il a dit?
- Il a dit quoi?
- Qu'en Corse, personne n'écoute, on entend.
- Nuance
- Tu as toujours mal mangé?
- Non, en montagne c'était super
- Et qu'as-tu mangé?
- Du saucisson au goût de charcuterie, du veau corse à la tomate, du sanglier, des gâteaux légers à la châtaigne au goût de châtaigne, le tout arrosé au vin de Sartène
- Du veau corse. Qu'est-ce que c'est du veau corse?
- Du veau rouge, du veau libre, du veau qui, depuis longtemps, ne tête plus le lait de sa mère.
- Façon de voir, ou plutôt de manger
- Et c'est tout ce que tu as vu en Corse?
- Tiens, demain, je vais te parler de Bonifaccio.